My Photo
Name:

Jean-Pierre Bekolo Obama est cinéaste et enseigne le cinéma aux États-Unis. Né au Cameroun, il est révélé à Cannes 1992 avec son film Quartier Mozart qu'il réalise à tout juste 25 ans. Ce film a obtenu de nombreux prix à Locarno, Montréal, Ouagadougou et une nomination aux British Awards aux côtés de Reservoir Dogs de Tarantino. Pour les 100 ans du cinéma, il réalise Le Complot d'Aristote, un film appartenant à une série commandée par le British Film Institute à laquelle ont participé Martin Scorsese, Stephen Frears, Bernardo Bertolucci et Jean-Luc Godard. Il a été professeur à l'University of North Carolina à Chapel Hill, à la Virginia Polytechnic Institute et à Duke University. Il a notamment développé une méthode d'enseignement, Auteur Learning, qu'il expérimente dans les Universités noires des Etats-Unis. Son dernier long métrage, Les Saignantes, a obtenu l’Etalon d'Argent et le prix Meilleures Actrices au Fespaco 2007. Il a réalisé la même année une installation vidéo, Une Africaine dans l’Espace, au Musée du Quai Branly à Paris. Son livre Africa for the Future sort en 2009 chez Dagan.

Monday, January 17, 2005

Un film de fiction MAN BLUM - L'ETRE BLEU

Un couple voyage en Afrique, la femme est enceinte. Le jour de l’accouchement ils sont chez les yezoums, un peuple de la forêt. L’enfant a beaucoup de mal à sortir. Une vieille suggère qu’on amène la femme au pied d’un arbre ayant appartenu à un homme très puissant de la tribu. Un dénommé Kah. On amène la femme et elle accouche très vite;c’est une fille. Toutes les vieilles s’exclament: "l’esprit Kah est toujours actif parmi nous". On décide d’appeller la fille "Kah". Les yezoum voient en la petite fille la réincarnation de l’homme qui fut le bras droit des rois: "l’homme aux milles secrets".

Kah grandit avec ses parents sans quitter l’Afrique. Un jour, le bébé disparaît toute la journée. Sa mère la retrouve dans la brousse couchée comme si on venait de l’amener.

Kah a une prémonition ; elle raconte à sa mère qu’elle va les perdre mais qu’elle ne sera pas seule. Sa mère lui demande de se taire. Un jour, alors que le couple se promène dans la brousse ils sont attaqués par des bêtes féroces sous le regard complice de Kah. Manblum, la sage de la tribu voit s’élever dans le ciel deux boules bleues et comprend que deux personnes viennent de mourir. Kah déambule seule dans la brousse à chaque fois de commander aux animaux et les animaux lui obéissent ; évitant ainsi le drame. Manblum découvre les traces de Kah et lui fait parvenir des messages à distance qu’elle essaie de décrypter. Puis elle répond avec des symboles que lui aussi décrypte. Il n’en revient pas, ils se parlent tous les deux dans un langage que eux seuls peuvent comprendre. C’est l’euphorie des deux côtés sans toutefois se voir. Une amitié est née. Au même moment, un hélicopter tourne dans le ciel. Manblum panique et cherche Kah. Il la retrouve assise au bord de l’eau. Á l’aide de sa sarbecanne, il lui lance une fumée bleue qui l’enveloppe et l’emporte dans le ciel. La bulle bleue atterrit en pleine nuit dans le village où tous habillés et près pour le rituel. Kah est accueillie par la danse et les cris quand la bulle éclate au sol. Commence la cérémonie. Kah le fait raconter l’histoire de la tribu depuis la création du monde jusqu’au jour de sa naissance. On l’enveloppe de plus de fumée ; elle pourra quitter physiquement le village mais ne pourra plus jamais le quitter en pensée car les yezoum ne pensent pas que nous vivont sur la terre mais plutôt dans nos histoires. Kah est la seule enfant née dans ce village depuis des décennies. Elle est sans aucun doute celle à qui le faiseur de mots doit initier à l’art de créer le monde avec des mots ; une vieille tradition yezoum permettant de changer de monde quand le monde a perdu son sens. Le lendemain, l’hélicopter débarque avec des soldats pour récupérer Kah de force et la ramener en occident. Les yezoum essaient en vain d’empêcher qu’elle ne parte mais ne peuvent s’opposer aux soldats. Une vieille finit par lâcher : "ne vous en faites pas, elle reviendra très bientôt. Elle appartient à ce monde, pas à leur".
En occident , Kah est d’abord accueillie dans un hôpital où on lui fait toutes sortes d’examens et de tests. Kah refuse de parler. Le médecin conclu qu’il s’agit d’un syndrome post traumatique et lui prescrit un nouveau style de traitement "virtual reality". Kah est inscrite à l’école et placée dans un orphelinat et les autres la sollicite pour entendre son histoire ce qui la rend très vite célèbre. Mais Kah ne raconte rien, elle ne parle à personne et ne s’intègre pas dans le nouveau monde qu’elle ne comprend pas et n’aime guère (elle a pour unique compagnon son cameléon qu’elle a ramené d’Afrique qu’elle porte tout le temps sur la tête).

L’institutrice se penche sur son dossier et se positionne pour son cas. Les résultats du test sont clairs, Kah se prend pour une africaine et veut parler aux animaux. Elle se culpabilise de n’avoir pas pu sauver ses parents. Elle se sent complice de leur mort.

Le lendemain, l’institutrice fait faire un calcul aux élèves elle dit : "Il y a quinze enfants, un gorille en mange dix, combien d’enfants restent-ils ? "Kah choquée répond "quinze", tout le monde se retourne, elle a parlé pour la première fois. L’institutrice poursuit : "faux". Kah s’explique. L’institutrice court dans tous les sens elle a trouvé la clé de l’énigme. Elle fouille dans les pensées de Kah. Kah, met la culture et la nature sur le même plain. Il faudrait qu’elle puisse non seulement les différencier, mais surtout placer la culture au-dessus. Les médecins s’interrogent comment cela se fait-il ?

Kah ne connaît pas la peur. On décide d’injecter la peur dans le traitement qu'elle suit. La peur de la nature.

À chaque séance de traitement, Kah lutte ; on voit deux histoires s’affronter ; celle qu’on veut lui imposer contre celle qu’elle porte en elle. Le traitement reste sans succès au grand désarroi de l’équipe scientifique qui commence à songer à aller un peu plus loin.

C’est à ce moment qu’un jour, des enfants s’amusent à s’envoyer mutuellement un os trouvé part terre. Cet os lancé en l’air retombe sur la tête de Kah, tuant ainsi le caméléon qui tombe du troisième étage. Kah enjambe la grille du balcon et saute sur un poteau qui se penche. Kah s’immobilise pour rester en équilibre. Les pompiers viennent la faire descendre. Cette nuit là, Kah sort du dortoir en douce pour regarder le ciel. Elle voit un grand cerf volant africain dans le ciel. Elle se lance à sa poursuite dans toute la ville. Elle réussit à le ramasser et reconnaît les signes qu’elle s’échangeait avec Manblum dans la brousse. Elle s’endort sur le trottoir. Une vendeuse de journaux la découvre à l’aube enveloppée dans le cerf volant. La vendeuse appelle les pompiers; c'est le même pompier qui l'a fait descendre du poteau qui la réveille. Kah se lève et s’enfuit vers l’aéroport semant le pompier dans toute la ville jusqu'à atteindre l'aéoroport. Kah se met en bout de piste et attend un avion qui s’apprête à décoller. Quand l’avion s’arrête avant de mettre les pleins gaz pour décoller, Kah court très vite s’agripper sur le train de la roue de l’avion sous le regard du pompier impuissant qui se contente de lui faire un signe d’adieu, elle répond. L’ami s’en va.

Kah sans le savoir allait ainsi vers une Afrique différente de celle de ses rêves. Kah allait tomber dans un monde corrompu qui avait perdu ses valeurs passées et qui n’avait pas les moyens de s’occidentaliser. Le train avant de l’avion s'ouvre; surprenant Kah dans un sommeil. Elle entamme ainsi une descente dans un monde que personne ne comprend plus ; pas même Manblum. Un monde qui devait retrouver son sens grâce à l'aide de Mankal, une belle jeune femme qui pouvait tout se permettre. Kah en plein cœur d’une cérémonie de deuil ressemblant plutôt à une fête et échange tout. Kah tombe du ciel et atterit sur le cercueil qui s’ouvre, et le mort est éjecté et se met à marcher sur quelques pas avant de s’écrouler de nouveau plus loin. C’est la débandade. Chacun essaie de ramasser sa bouteille de bière et de s’enfuir. La police passe les menottes au mort et à Kah et les embarque au commissariat. Un couple africain vient supplier le chef de la police moyennant quelques billets de leur rendre leur enfant blanc. Le policier, pour laisser l’enfant demande de l’argent et le couple lui en donne, le policier propose lui-même d'établir l’acte de naissance à l’enfant moyennant encore plus d’argent, le couple paye encore. Le policier leur remet Kah, la femme qui n'est autre que Mankal paye l’homme qui n’était qu'un faux mari ; et il s’en va. Mankal reste seule avec Kah qu’elle ramène chez elle en plein quartier. Mankal lui fait croire qu'elle a toujours rêvé avoir un enfant et voilà que Dieu a exaucé ses prières. Kah ne pose pas de question et la suit partout. Ils prenent le taxi de brousse et se rendent au village à Milan où Kah est née. Mankal a été effectivement envoyée par les Yezoums pour accueillir Kah qu'ils ont fait revenir. Le temps était venu où la petite fille qui était la réincarnation de l'esprit de Kah devait partir chercher le langage qui allait sauver non seulement son peuple, mais toute l’humanité. La vie avait perdu de sens comme le pensent les yezoums, ce n’est pas la vie qu’il fallait changer, mais plutôt le miroir à travers lequel on regarde la vie. Et ce miroir c’est la langue. Une langue qui n’arrive plus à nous interpréter le monde. Il fallait donc retourner dans la nature, réapprendre à lire et créer une langue qui va porter le sens des choses. Tel était le rôle des "Faiseurs de Mots". Manblum en était un très célèbre car les "wordmakers" sont des "worldmakers" (les faiseurs des mots sont faiseurs de monde). Kah avait pour mission de refaire un monde heureux. On lui donna les dernières bénédictions. Mankal l’accompagne aux portes du désert, L'esprit de Manblum est avec elle. Kah entre dans le désert comme on entre chez soi. Elle y retrouve des amis animaux, elle y retrouve aussi l’espace et le temps. L’aventure de Kah allait être un déchiffrement du monde ; un parcours minutieux pour relever sur la surface de la terre les figures qui montrent que les histoires disent vrai.

Mankal lui dit les dernières recommandations ; Kah ne devait pas s’encomber de ce dont elle n’avait pas besoin, la nature allait le lui apporter au fur et à mesure. Kah devait observer et mémoriser.

La nature entière salua Kah même si Kah était apparemment seule elle restait en contact avec Manblum à qui elle avait le droit de poser 5 questions seulement grâce à une flûte qui envoyait des ondes par l’eau qu’il lisait.

Kah fut sur une longue distance pas un babouin qui n’arrêtait pas de la provoquer. Agacée, Kah fit un retour vers le babouin pour lui dire, ‘’tu n’as pas honte ?’’ ce qui surpris le plus Kah, c’est le sentiment que le singe capta intégralement le message. Elle essaya toute la journée de se rémémoriser du geste qu’elle a fait en refaisant un nombre infini de fois cette mimique. Kah sut qu’elle avait trouvé quand un caméléon qui l’observait déjà depuis quelques temps eut la même réaction que le singe. Kah pris ce dernier et l’emporta avec elle. Elle cherche un bout de bois et se fabrique un canivet pour sculpter sur un bout de bois le symbole de ce geste qu’elle venait de faire.

Après plusieurs heures passées à sculpter le bois, Kah lève la tête et voit l’arc en ciel. L’idée que la terre et le ciel étaient amoureux lui traversa l’esprit. Kah passa beaucoup de temps à contempler la beauté de la nature.

Un matin, Kah marchait dans la direction opposée au soleil levant. Elle eût une soudaine envie de se retourner. Quelle ne fut sa surprise de voir sa bouche se remplir de plusieurs lettre ‘’b’’, la taille de ce qu’elle avait c’était un éléphant. Voilà comme ‘’bbbb’’ désigne dans le langage de kah quelque chose d’énorme. l’éléphant passa Kah et poursuivit sa route. Kah s’assès pour sculpter ce signe quand un crapeau se mit à croisser sans arrêt, l’empêchant de se concentrer, Kah arrêta de sculpter et imita le crapeau ‘’croak croak’’ puis elle éclata de rirer. Hah abandonna ce qu’elle faisait et se mit à se moquer du crapeau. C’était un gros crapeau-buffle. En le voyant, Kah eût pitié de la pauvre bête, elle eût un remord. Pouvait-il être autre chose que ce qu’il était. Kah le ramasse et le prit dans ses bras.

Kah collecta ainsi de nombreux signes correspondant à son aventure parmi les animaux. Quand le voyage déboucha de nouveau sur les hommes, Kah dû ne plus se contenter des signes mais écrire une histoire entière et pas n’importe laquelle. La rencontre de Kah avec une femme qui dansait pour se moquer des gens fût une révélation (qui n’était autre que sa mère). Kah se mit à écrire pour se moquer. C’est dans la moquerie et l’humour que les deux femmes scellèrent une amitié. Kah excellait dans les métaphores où elle comparait les hommes aux animaux. Un jour, Kah et la jeune femme se disputèrent, l’une pensait que l’autre la dansait, et l’autre pensait que l’autre l’écrivait. Quand leurs chemins se séparèrent, Kah avait terminé son voyage initiatique et pouvait ramner au village la langue qui n’allait pas seulement permettre de raconter mais aussi de réinventer le nouveau monde. Kah faisait de la poésie, elle parlait une langue dans la langue. Elle faisait mieux qu’imiter le monde, réclamait un sens aux mots qui l’avait perdu. Elle considérait les mots comme les choses. Kah était devenue poète yezoum, la tribu était immortalisée, sa légende allait voyager dans l’espace et dans le temps. Kah avait à côté sa propre histoire depuis sa naissance. Elle était devenue un homme.


0 Comments:

Post a Comment

<< Home